Au Pont de l’Arc à Aix-en-Provence est localisé un des trois sites du CREPS Provence-Alpes-Côte d’Azur instauré par le décret du 30 mai 2001. Les deux autres sont situés à Boulouris près de Saint-Raphaël et à Antibes au pied du Fort Carré. En France 17 Centres de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS) constituent un réseau national placé sous l’égide de l’État, via le ministère chargé des Sports, et des Régions. Ils ont pour objectif d’assurer la réussite sportive et éducative des sportifs de haut niveau et l’accompagnement des sportifs régionaux, ainsi que la formation initiale et continue des entraîneurs et des animateurs sportifs, sans oublier la promotion du sport santé et du sport pour tous. Les missions des CREPS sont donc marquées du sceau de la diversité, qui est un héritage de leur longue histoire débutée il y a plusieurs décennies au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
Un complexe sportif en constante extension
Le site d’Aix du CREPS se situe au domaine de la Madeleine sur lequel est construite en 1732 une bastide, toujours présente aujourd’hui. Le domaine est d’abord occupé à des fins éducatives par les Jésuites jusqu’en 1764, date de l’expulsion de cette congrégation du royaume de France. Il est ensuite propriété de familles de la noblesse, puis de la bourgeoisie après la Révolution française. Le domaine passe dans le giron de l’État le 8 avril 1942 lorsque le Commissariat général à l’éducation générale et sportive (CGEGS) en fait l’acquisition afin de l’intégrer à un dispositif établi par le régime de Vichy en vue de mener une régénération morale et physique de la jeunesse.
En 1945, le Centre régional d’éducation physique et sportive (CREPS) est instauré sous la tutelle du ministère de l’Éducation nationale. Maurice Gastaud, ancien professeur d’éducation physique au lycée Mignet d’Aix-en-Provence, en devient le premier directeur, charge qu’il assume jusqu’en 1966. Les installations existantes se résument presque uniquement à la vieille bastide abritant au rez-de-chaussée la salle à manger et la salle d’étude, alors qu’au premier étage se trouvent les bureaux, une pièce servant de bibliothèque et de coopérative ainsi que l’appartement du directeur. Au second sont localisés l’infirmerie, des locaux pour les malades et le logement de l’économe. Dans l’aile est de la bastide, ne communiquant pas alors avec le bâtiment principal, se trouvent des chambres pour les stagiaires. Hormis des locaux servant de vestiaires, douches, lingerie ou au rangement du matériel, le CREPS ne dispose que d’un seul autre baraquement en dur à usage de dortoir et dépourvu de confort. Une baraque en bois, laissée par l’armée, permet, elle, d’abriter les activités de certains stages. Les équipements sportifs se composent d’un terrain de football où se pratique aussi le handball, deux terrains de volley-ball, deux de basket-ball, une piste de mâchefer d’une longueur inférieure à 100 mètres, et un sautoir. Toujours en extérieur un portique monumental, des poutres, une barre fixe, des barres de suspension, des échelles horizontales complètent les installations et permettent notamment la pratique de la gymnastique. Enfin au fond de la propriété se trouve un bassin d’arrosage avec de hauts murs en béton, qui sera par la suite transformé en piscine.
Des aménagements sont ensuite effectués, dans les années 1950 par l’architecte Fernand Pouillon, aussi connu dans la région pour avoir activement participé à la reconstruction du Vieux-Port à Marseille et à la construction d’un important ensemble résidentiel à Aix-en-Provence. Au sein du CREPS Fernand Pouillon, secondé par son collaborateur René Egger, conçoit un ensemble de bâtiments comprenant un foyer, deux internats (le Montaiguet et la Guiramande), deux salles de réunion et surtout un indispensable gymnase omnisports, qui porte aujourd’hui son nom et a été labellisé, en l’an 2000, « Patrimoine du XXe siècle » par le ministère de la Culture. Certaines des constructions ont toutefois été détruites dans les années 1990 à la faveur d’un nouveau bâtiment d’internat.
Puis en 1956, l’acquisition de plus de deux hectares et demi de terrains auprès d’un particulier, voisin immédiat du domaine permet d’aménager de nouveaux terrains de sports collectifs pour pratiquer le football et le rugby. Sous la direction de son second directeur Roger Roustouil (1966-1986), le CREPS continue à s’étendre et à se développer : une salle d’agrès voit le jour, suivie en 1961 d’une salle de danse et en 1968 d’une salle polyvalente. Cette année-là de nouveaux achats de terrains interviennent : d’une part ceux situés à l’ouest de la propriété vendus à l’État par la distillerie « L’Aixoise » et d’autre part ceux acquis auprès d’un particulier et représentant une parcelle contiguë de 6000 m² appartenant à la propriété La Pauliane. À partir de l’année suivante débute la construction d’une halle des sports, avec terrains de basket-ball, suivie d’un ensemble comprenant un amphithéâtre, un atelier audiovisuel (La Villa) et un restaurant, alors qu’un second terrain de grand jeu voit le jour par la suite. À la fin de la décennie, deux salles spécialisées permettant de pratiquer respectivement l’escrime et l’haltérophilie apparaissent et un pas de tir est aménagé pour s’entraîner à une des épreuves du pentathlon moderne.
Dirigé par Jean-Claude Durand (1986-1995), le CREPS d’Aix-en-Provence, désormais résolument tourné vers la formation des sportifs de haut niveau, s’équipe d’un nouvel internat, mais aussi d’équipements sportifs très modernes. Ainsi en 1994, à l’occasion d’une visite de la ministre de la Jeunesse et des Sports Michèle Alliot-Marie, est inauguré un mur d’escalade, au profil tout en dévers, au sein de la halle des sports. Le choix d’effectuer cet important investissement se justifie, car la discipline séduit un nombre croissant de jeunes à quelques encablures du massif de la Sainte-Victoire et non loin des calanques de Marseille. Depuis son inauguration en 1988, le CREPS d’Aix-en-Provence dispose, en outre, d’un centre de médecine sportive et de rééducation fonctionnelle de grande renommée, où de nombreuses fédérations envoient leurs athlètes pour réaliser des tests.
Les directeurs suivants doivent à la fois entretenir, améliorer ou transformer l’existant et trouver les financements pour construire de nouvelles installations sportives au gré des opportunités d’ouverture de structures de haut niveau dans telle ou telle discipline. Pour accueillir un pôle de Taekwondo, un dojang est ainsi aménagé dans le bâtiment servant auparavant de salle d’agrès, qui subit pour l’occasion une profonde transformation. En 2005, une piste de BMX est tracée, puis remodelée et dotée d’une butte de départ de 8 mètres pour être mise aux normes olympiques et accueillir la préparation de l’équipe de France en vue des Jeux olympiques de Londres 2012. La même année quatre cours de squash voient le jour et un cinquième vitré est créé en 2013 à l’intérieur du gymnase Pouillon. En 2006, une aire de beach soccer est aménagée.
Lorsqu’en 2016, la loi NOTRe, s’inscrivant dans un nouvel acte de la décentralisation, transfère le foncier et le bâti de l’État à la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur le CREPS dispose donc d’une grande variété d’équipements qui répondent à la fois aux diverses fonctions de formation, à l’évolution des pratiques sportives et à la prise en charge par l’État du sport de haut niveau.
Un lieu de formation des enseignants d’EPS et des cadres sportifs
Les CREPS sont les héritiers de structures créées par l’État au cours de l’entre-deux-guerres et prolongées par le régime de Vichy afin de former les enseignants d’éducation physique. Envisagés dès 1937 par le sous-secrétaire d’État chargé des Sports, des Loisirs et de l’Éducation physique au sein du gouvernement de Léon Blum, Léo Lagrange, des Centres régionaux d’éducation générale et sportive (CREGS) sont créés sous le régime de Vichy, par la loi du 21 mars 1941. Ils sont rebaptisés Centres régionaux d’éducation physique et sportive (CREPS) en 1945, alors que la République renaissante souhaite procéder à un renouvellement de ses cadres. Dès 1946, celui d’Aix-en-Provence possède des classes préparatoires à la première année du professorat d’éducation physique et au concours d’entrée à l’École normale supérieure d’éducation physique (ENSEP). Les premières années, l’établissement aixois reçoit des promotions de garçons, puis à partir de la rentrée 1948 et jusqu’en 1973 exclusivement des filles.
Le CREPS d’Aix-en-Provence constitue aussi, dès l’origine, un lieu d’accueil de stages pour des publics variés tant français qu’étrangers. L’encadrement de stagiaires originaires de la région permet à l’établissement de renforcer son ancrage local. Ainsi au mois de juillet, des instituteurs et institutrices issus des écoles normales de l’académie viennent se former aux bonnes pratiques de l’éducation physique. Durant les vacances estivales, des stages dits « de perfectionnement » sont aussi proposés à l’ensemble des enseignants avec danse pour les femmes et basket-ball pour les hommes.
Des stages plus spécifiques, se déroulant souvent sur une période relativement courte, sont par ailleurs proposés à un public varié. Cela va de stages classiques d’athlétisme à ceux destinés à accroître les compétences des intervenants du secteur extra-scolaire, comme les éducateurs spécialisés, les futurs moniteurs des colonies de vacances et les animateurs de la jeunesse ouvrière (JO). Le CREPS accueille également ponctuellement des élèves de l’École nationale de ski et d’alpinisme (ENSA) de Chamonix.
De 1973 à 1985, le CREPS d’Aix-en-Provence assure, en trois ans, la formation des professeurs-adjoints d’EPS. Ces derniers sont recrutés sur une option sportive, comme la gymnastique, la danse, l’athlétisme ou la natation. À partir de 1981, la réintégration de l’EPS comme discipline scolaire à part entière dans le giron du ministère de l’Éducation nationale ainsi que la reconnaissance comme discipline universitaire des Sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS) en 1983 conduit les CREPS à ne plus assurer la formation des professeurs de l’enseignement secondaire.
Devenus, par le décret du 14 mars 1986, des Centres régionaux d’éducation populaire et de sport, les CREPS se voient assigner, outre le suivi global des athlètes de haut niveau, la formation des cadres sportifs et de ceux de l’animation jeunesse. Les enseignants et intervenants du CREPS d’Aix-en-Provence préparent ainsi les uns au diplôme d’État aux fonctions de l’animation (DEFA), et les autres soit au brevet d’État d’éducateur sportif (BEES) 1er et 2e degré, soit au professorat de sport. Des formations complémentaires et stages divers sont parallèlement mis en place, sous le double effet du besoin d’encadrement induit par le développement des activités physiques et sportives de loisirs dans la société française et de la nécessité pour le CREPS de trouver des ressources propres. Sur le site d’Aix sont aussi proposés de longue date des stages de toute nature (formation initiale, formation continue, entraînement, séminaires…) s’adressant à divers publics tout en développant des relations privilégiées avec le milieu associatif aixois.
Une pépinière de champions
Par ailleurs, des sportifs de haut niveau ont pu très tôt profiter, ponctuellement ou plus durablement, des installations du CREPS d’Aix-en-Provence pour se préparer à certaines grandes échéances sportives nationales et internationales. En octobre 1959, cinq membres de l’équipe de France féminine de ski séjournent ainsi sur place en pleine préparation pour les Jeux olympiques d’hiver devant se dérouler au mois de février suivant à Squaw Valley en Californie. Jean-Paul Coche, premier médaillé olympique français en judo à Munich en 1972, a également fréquenté l’établissement où un espace lui est aujourd’hui consacré. C’est toutefois à partir de 1986 que le CREPS d’Aix-en-Provence s’oriente plus résolument, comme ses homologues au niveau national, vers la préparation sportive, scolaire et professionnelle des jeunes sportifs de haut niveau. Il accueille alors officiellement en son sein des Centres permanents d’entraînement et de formation (CPEF), rebaptisés en 1995 Pôles France et Espoirs, dans des disciplines aussi variées que l’haltérophilie, la natation synchronisée, le football, la moto trial ou l’escrime. En 1996, le site d’Aix-en-Provence accueille les pôles France de squash et de taekwondo. En 2001, un département du sport de haut niveau est créé, comprenant un pool d’entraîneurs par spécialité, une unité médicale et de récupération, une équipe de suivi scolaire, un préparateur physique et un préparateur mental, afin de permettre de mener un double projet sportif et scolaire ou universitaire.
Rebaptisé en 2011, Centre de Ressources, d’Expertise et de Performance sportive, le CREPS continue à assurer sa mission principale à destination des sportifs de haut niveau. Actuellement, le site d’Aix-en-Provence héberge des pôles France en athlétisme (sprint, haies), escrime (fleuret), natation artistique, pentathlon moderne (mixte), squash (mixte) et taekwondo ainsi que des pôles espoir en badminton (mixte), basket-ball (masculin et féminin), escrime (mixte fleuret), handball (masculin), squash (mixte) ou des centres d’accession et de formation (CAF) en natation et waterpolo, mais aussi un centre régional d’entraînement de golf et une académie mixte de rugby. Le dispositif a été renforcé en 2021 par la mise en place d’une Maison régionale de la performance impulsée par l’Agence nationale du sport qui assure un suivi individualisé des sportifs de haut niveau. Dans ces conditions, les terrains du site d’Aix-en-Provence ont été foulés par un très grand nombre de champions qui ont brillé lors de compétitions internationales.
En 2024, le site d’Aix, comme les deux autres du CREPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, est labellisé Centre de préparation aux Jeux olympiques et paralympiques dans de nombreuses disciplines. Le 12 mai 2024, le relais de la flamme olympique, qui a débarqué à Marseille le 8 mai, y prend son départ pour une étape s’achevant sur le cours Mirabeau devant plus de 10 000 personnes. Un Club France est parallèlement inauguré au sein de ce fleuron du sport aixois, en présence du directeur général du CREPS, Jérôme Rouillaux, et du représentant de Renaud Muselier, président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Bibliographie
Michaël Attali, Jean Saint-Martin, L’Éducation physique de 1945 à nos jours, Paris, Armand Colin, 2021.
Marc Bédarida, Fernand Pouillon, Paris, Éditions du Patrimoine, 2012.
Patrick Clastres, Paul Dietschy, Sport, culture et société en France du XIXe siècle à nos jours, Paris, Hachette, 2006.
Fuchs Julien, Renaud Nicolas (dir.), Former les enseignants d’EPS en France au XXe siècle, Rennes, PUR, 2020.
Jacques Rangeard, La saga des CREPS et autres établissements « jeunesse et sport » : Quel avenir après 50 ans ?, Marly-le-Roi, INJEP, 1996.