Le Golf de Cannes Mandelieu

Le Golf de Cannes Mandelieu

Le golf de Cannes -Mandelieu est le plus ancien des golf-clubs de la Côte d’Azur qui soit toujours en activité. À ses débuts il est simplement appelé le Cannes Golf Club. Il n’y avait aucune ambiguïté : il est le seul ! C’est le premier à être créé par un non Britannique, très précisément un Russe : le grand-duc Michel Mikhaïlovitch qui en le président jusqu’à son décès en 1929 à Londres.

En France, il ne reste plus que trois parcours qui soient plus anciens : Pau (1856), Biarritz (1888) et Dinard (1890).

Le golf au centre des mondanités azuréennes

Le premier parcours du golf de Cannes est établi en décembre 1891 sur la plaine de Saint-Cassien. Mais le terrain est morcelé : il y a trente-six propriétaires, ce qui fait dire à l’époque au golfeur anglais Horace Hutchinson, qui reprend l’expression de Frédéric William Mariassy, auteur en 1894 du premier livre sur le golf en France, qu’il y en a trente-cinq de trop ! Il s’agit donc de trouver un autre endroit.

Dès l’année suivante, on découvre un terrain plus propice. Le club est alors établi à l’endroit que nous connaissons aujourd’hui. Il y avait là une grande ferme qui sera transformée en club-house. Mais dès l’année suivante, pour la saison 1893-1894, l’architecte Léon Nouveau modifie son aspect extérieur en y ajoutant des colombages qui lui donneront cet aspect que certains qualifient de normand.

Pour montrer, s’il en était besoin, la puissance du président de ce club de golf, il faut signaler que si La Napoule possède aujourd’hui une station de train, c’est grâce au grand-duc Michel qui l’inaugure, en 1893, pour faciliter la venue des Hivernants au club de golf. Très prisé de ces Hivernants qui viennent en villégiature sur la Côte d’Azur, le golf club ouvre ses portes le 1er novembre, pour les fermer à Pâques. Face à un tel engouement, le golf de Cannes offre très rapidement un parcours de 18 trous plus un autre de 9 trous. Ce dernier a été pendant quelques années réservé aux dames.

Un haut-lieu de la compétition

En 1904 et 1905, une grande compétition se joue entre Cannes et le Royal Liverpool Golf-Club (situé à Hoylake). C’est la première grande compétition internationale par équipe qui se joue en deux temps : un aller à Cannes et un retour à Hoylake.

En 1906, sous la direction du colonel Woodward, Honorary Secretary du club, le tracé initial du routing (l’espace allant du tee de départ jusqu’au green où se trouve le trou proprement dit) est modifié pour le rendre plus long et accueillir, l’année suivante « le grand tournoi de Cannes ». Depuis cette date le parcours a gardé son esprit, même si quelques trous ont été déplacés.

Si on a pu attribuer au golfeur Harry Shapland Colt, ancien capitaine de l’équipe de l’Université de Cambridge, architecte de nombreux parcours en Grande-Bretagne et sur le continent européen, le dessin du parcours de Cannes Mandelieu, c’est en réalité le colonel Woodward, membre du club cannois, qui en est l’auteur. Il est toutefois vraisemblable que Colt ait suggéré quelques ajustements vers 1910.

On ne peut pas parler du Cannes Golf Club, sans dire quelques mots du « grand match de 1907 ». C’est le grand-duc Michel qui en a l’idée. Passant de longs moments en été à St Andrews et à North Berwick, centres éminemment golfiques, il y rencontre tous les grands champions de l’époque. Douze des plus grands champions du moment sont alors invités pour participer à une compétition richement dotée. Parmi les joueurs on peut voir, outre le grand triumvirat britannique (Vardon, Taylor et Braid) un Français : Arnaud Massy. Formé à North Berwick et déjà réputé en Grande-Bretagne, ce basque obtient, quelques mois plus tard, une immense renommée en remportant le British Open, que l’on appelle à l’époque le Championnat du monde. Aucun Français n’a réussi à égaler cet exploit. Lors du tournoi de Cannes, il remporte la compétition en « simple » mais aussi celle en « double ».

Un leadership en déclin

Au lendemain de la Première Guerre mondiale, des difficultés apparaissent. La révolution bolchévique de 1917 ruine bien des membres du club. Le grand-duc Michel n’a plus les moyens de son rang mais George V, le roi d’Angleterre, lui apporte son aide. Il devient rapidement irascible et, s’il garde la présidence du club jusqu’à sa mort en 1929, c’est le grand-duc Cyrille à la tête d’un petit groupe de personnalités, qui assume le parrainage du club. Rapidement, les deux personnages essentiels dans la vie du club seront alors, jusqu’en 1933, l’amiral Wester Wemyss, premier lord de l’amirauté signataire pour le compte de la Grande-Bretagne de l’armistice de 1918, puis Lord Derby ancien ambassadeur de la couronne britannique disposant comme beaucoup de ses riches compatriotes d’une villa à Cannes. À noter que ce dernier sera également l’un des membres fondateurs du golf de Mougins – et son deuxième président.

D’autres personnalités sont intimement liées au golf de Cannes à l’image de Nicolas Popoff pionnier de l’aviation qui effectue, en 1910, lors du meeting d’aviation de Cannes (juste avant celui de Nice) la traversée aller-retour entre Cannes et les Iles de Lérins. Après la révolution bolchévique, ruiné, il sera le starter au golf de Cannes. Avant de se suicider aux bains-douches de la ville, il publie un livret sur l’étiquette au jeu de golf, illustré par Stollesky.

C’est au lendemain de la guerre, plus exactement en janvier 1922, que le club sera témoin d’un « match » entre les ministres des Affaires étrangères Aristide Briand et Lloyd George, lors de la Conférence dite de Cannes, qui réunit les pays vainqueurs de la Première Guerre mondiale pour discuter des dommages de guerre que doit payer l’Allemagne. En vérité, ce n’est pas un match, Briand n’avait jamais joué au golf. Ce n’est qu’une initiation – ou même une simple découverte – que lui offre Lloyd George. Mais cette partie de golf restera dans les annales, car elle vaudra à l’opposition de dire que « Lloyd George donnait une leçon à Aristide Briand » lorsqu’il fallut à ce dernier un quart d’heure pour se sortir d’un bunker, sous les risées de tous les présents. Même si la portée de cette anecdote a été exagérée, le président du Conseil doit démissionner, mettant ainsi fin à la conférence de Cannes.

D’un club essentiellement mondain, le club est devenu plus sportif qu’il ne l’était et de grandes compétitions internationales vont s’y dérouler. On citera par exemple le championnat Omnium de la Côte d’Azur.

Bibliographie

Hutchinson, Horace, British Golf Links, J.S. Virtue & Co, London, 1897.

Kazmierczak, Jean-Bernard, Le Cannes-Golf Club dit Cannes Old-Course, à paraître.

Mariassy, Fréderic William, Le Golf en Angleterre et les golfs club de France, Cannes, Robaudy, 1895 [1894].

Popoff, Nicolas, Golf Etiquette, Paris, 1928.

Voir aussi les très nombreux journaux de l’époque, en France, essentiellement Le Littoral. Tous les journaux britanniques ont consacré de longs articles ; la liste est trop longue pour qu’ils puissent être cités.

Kazmierczak, Jean-Bernard