Le stade municipal de Saint-Tropez a vu le jour dans les années 1930, et sa construction s’inscrit dans une volonté affirmée de développement de cette contrée varoise de la part des pouvoirs publics. Elle répond aussi aux aspirations du club local de pouvoir s’entraîner et jouer ses rencontres sur le territoire communal. Ce lieu de pratique sportive constitue, dès ses premières années d’existence, l’antre de l’Union Sportive tropézienne (UST) fondée en 1919. Après sa reconstruction, achevée en 2021, le stade conserve le nom d’un illustre enfant du pays à la renommée nationale, Marcel Aubour, gardien de l’équipe de France de football au cours des années 1960 ayant notamment participé à la Coupe du monde 1966 en Angleterre.
Un aménagement complexe issu d’une volonté de développement
Dans le cadre de la première loi de planification urbaine, votée en 1919, un plan d’aménagement d’extension et d’embellissement est élaboré pour la presqu’île de Saint-Tropez au début des années 1930. Celui-ci intègre la volonté de développer le sport en comportant une infrastructure qui doit être réalisée par la commune. Cette décision municipale prise en avril 1930 répond aussi au vœu du club local. En effet sans terrain à Saint-Tropez, l’UST doit se déporter vers la commune voisine de Gassin, au quartier de la Foux, pour développer ses activités. Or un tel éloignement n’est guère propice à l’essor du club. L’implantation du stade au quartier de la Bouillabaisse, excentré de l’agglomération, nécessite l’achat de quatre terrains, identifiés par l’architecte en charge du plan d’aménagement. Les propriétaires, réfractaires à vendre leurs biens, refusent de les céder et la commune doit en trouver d’autres à proximité. Le financement s’avère également complexe. Outre l’achat des terrains, il faut en effet réaliser plusieurs travaux de nivellement et d’aménagement ainsi qu’un mur de soutènement. La commune emprunte 125 000 francs et sollicite une subvention de l’État. Dans ces conditions, elle prévoit de louer le terrain à l’UST pour 7 001 francs annuels. Les travaux commencent en 1932 par un premier aménagement qui ne suffit pas à rendre le terrain praticable. La subvention se fait attendre, elle ne sera accordée qu’en 1935 à hauteur de 40 000 francs. Le nivellement définitif est réalisé en 1934 et le terrain enfin mis à la disposition des sportifs. La réalisation de ce stade est donc presque contemporaine de la politique volontariste du Front populaire, menée à partir de 1936 par le sous-secrétaire d’État aux Loisirs et aux Sports Léo Lagrange, en matière de construction de nouveaux équipements sportifs, dans le but de démocratiser la pratique du sport et ne plus la réserver à une élite socialement favorisée. Dans les années suivantes, d’autres aménagements sont réalisés. En effet l’absence de clôture empêche le club de percevoir des recettes de billetterie, pourtant indispensables pour dégager la somme nécessaire au paiement de la location annuelle. En 1937 un mur en ciment est donc construit tout autour de l’enceinte. Les vestiaires font également défaut jusqu’à ce qu’un particulier vende à la commune, en 1937, une « baraque-vestiaire » qui est installée au plus près du terrain.
L’antre de l’Union Sportive tropézienne
Fondée en 1919, l’UST regroupe à l’origine trois sections : football, rugby et sports athlétiques. Ses statuts précisent que « ce groupement (…) a pour but d’encourager les sports sous toutes leurs formes (gymnastique, tourisme, natation, cyclisme, éducation physique, etc.) ». C’est cependant le ballon rond qui lui permet d’écrire les plus belles pages de son histoire. Voué dès son origine à ancrer la pratique sportive chez les plus jeunes, le club a notamment vu éclore deux footballeurs ayant poursuivi une carrière professionnelle. Né à Saint-Tropez en 1940, le gardien de but international Marcel Aubour joue de nombreuses années à l’UST avant de rejoindre, à 18 ans, l’Olympique Lyonnais, club avec lequel il remporte la Coupe de France en 1964 et dispute la même année, la demi-finale européenne de la Coupe des vainqueurs de coupes. Sélectionné à vingt reprises en équipe de France entre 1964 et 1968, il participe notamment, comme portier titulaire, à la Coupe du monde 1966 en Angleterre. La France est cependant éliminée dès le premier tour. Marcel Aubour poursuit ensuite sa carrière à l’OGC Nice, au Stade Rennais, avec qui il remporte une seconde fois la Coupe de France en 1971, et au Stade de Reims avant de revenir s’établir dans son village natal. Son ami Jean-Pierre Serra, enfant lui aussi de Saint-Tropez et d’un an son cadet, fait également une carrière professionnelle longue de plus d’une décennie passant par l’OGC Nice, Grenoble, le Stade Français, le Sporting Lisbonne, Bastia, le Stade de Reims, l’AC Ajaccio et enfin le Sporting Club de Toulon. Cet attaquant et remarquable buteur totalise 330 matchs professionnels au cours desquels il marque la bagatelle de 139 buts. La section football de l’UST est aujourd’hui forte de près de 200 licenciés et continue à porter haut les couleurs tropéziennes. L’équipe fanion a ainsi remporté en 2018 la Coupe du Var, puis l’année suivante, à l’issue d’une brillante saison, elle a été sacrée championne du Var en gagnant le championnat de Départementale 1, ce qui lui a permis d’accéder à l’échelon régional.
La reconstruction du stade municipal
Malgré de bonnes performances footballistiques, l’UST évolue sur un stade vétuste, qui n’est plus aux normes, ce qui pourrait entraver à terme l’accession de l’équipe aux échelons supérieurs. La municipalité de Saint-Tropez s’engage donc à remédier à cette situation en favorisant l’éclosion d’un équipement sportif moderne. Après la destruction de l’ancien stade et les indispensables opérations de désamiantage, la construction du nouveau stade est lancée en 2019 à l’emplacement de l’ancien. Les travaux ont certes été freinés par l’irruption de la crise pandémique du COVID-19, mais ils s’achèvent au début de l’année 2021, donnant naissance à une enceinte moderne s’étendant sur plus de 8 000 mètres carrés. Le stade dispose désormais d’une pelouse synthétique et d’un système d’éclairage plus performant. Une nouvelle tribune pouvant accueillir confortablement 300 spectateurs voit également le jour, et plus de 130 places debout sont disponibles. Les vestiaires, l’infirmerie et le club house sont eux regroupés dans un bâtiment unique pour plus de commodité. Dès août 2021, le nouveau stade accueille un match caritatif estival auquel participent plusieurs personnalités du monde du spectacle, dont le chanteur Patrick Bruel. Le stade conserve le nom de Marcel Aubour, donné à l’enceinte tropézienne dès 2008 par la municipalité. Le dimanche 13 août 2023, le nouveau stade est d’ailleurs inauguré, en présence de l’intéressé, d’ex-coéquipiers, de son successeur en équipe de France, Georges Carnus, et d’anciens autres internationaux de renom appartenant à des générations postérieures, tels Jean Tigana, Bernard Bosquier, Luis Fernandez, Basile Boli ou l’ancien gardien de but Bernard Lama. Son compère Jean-Pierre Serra, dont la nouvelle tribune porte le nom, est également de la fête aux côtés de membres de l’UST. Un challenge Marcel Aubour, réservé aux jeunes footballeurs de moins de 9 ans et rassemblant près d’une trentaine d’équipes, est également disputé annuellement au stade municipal de Saint-Tropez.
Bibliographie
Paul Dietschy, Histoire du football, Paris, Perrin, 2014.
Pascal Ory, La Belle illusion : Culture et politique sous le régime du Front populaire (1935-1938), Paris, Plon, 1994.
Philippe Tétart (dir.), Histoire du sport en France T. 1 : Du Second Empire au régime de Vichy, Le Mans, Université du Mans, 2007.