Le pavillon flottant de Société nautique de Marseille

Le pavillon flottant de Société nautique de Marseille

Flottant au cœur du Vieux-Port, le Pavillon flottant de la Société nautique de Marseille se fond idéalement dans le paysage. Amarré aux quais depuis la fin du XIXe siècle, il est le siège de l’un des plus anciens et des plus importants clubs de voile de Marseille : la Société nautique de Marseille.

Le siège de la Société nautique de Marseille

Créée en 1887, la Société nautique a pour objectif de remplacer la vieillissante et peu active Société des régates marseillaises, créée en 1862 et chargée de l’organisation de régates internationales chaque année à Marseille. Rapidement, la SNM prend le relai et contribue au développement du yachting à Marseille. Elle organise les principales régates de la ville et récupère une partie de la gestion des pannes du port.

Les premières années, les sociétaires, représentants de l’élite sociale locale, se réuniront à proximité du Vieux-Port dans des cafés : le café de l’Univers sur la Canebière puis au café des États-Unis quai du Port ou encore au restaurant Boboul, rue Saint-Ferréol. Toutefois, cette instabilité amène la commission administrative de la SNM à chercher un nouveau local. Une proposition de la maison Revertégat, relayé par des membres de la société émerge en avril 1898. La commission convoque une assemblée générale extraordinaire le 5 mai pour trancher la question du local. Le président, Alphonse Grandval détaille alors le projet d’un « house boat […] qui serait placé dans le port de Marseille, au quai de la Fraternité » pour un coût de 53 000 francs. Le projet est adopté par 48 des 62 membres présents lors de l’Assemblée générale. Quelques semaines plus tard, la SNM confirme le choix du projet de la maison Revertégat qui offre l’avantage d’une construction rapide puisqu’elle s’engage à construire le house-boat en quatre mois.

Le Pavillon flottant de la Société nautique de Marseille est finalement inauguré quelques mois plus tard, le 15 janvier 1899, et reçoit les sacrements du chanoine Gamber. D’une superficie d’environ 350 m² sur deux niveaux, il dispose de différents salons tandis que le pont supérieur est une terrasse couverte d’une tonnelle, qui sera rapidement aménagée pour accueillir le restaurant.

Ancrage dans le paysage local

Coiffé du pavillon de la SNM, l’édifice est capable de se déplacer. Or, une fois installés au quai de la Fraternité, ses déplacements se limitent aux grandes occasions et à son carénage. En 1902, il rejoint l’Estaque, malgré le mistral, pour soutenir les grandes fêtes qui s’y déroulent. Peu pratiques, ces déplacements se font rares. Hormis pour son entretien, en 1914, 1930, 1957 puis tous les dix ans environ, le Pavillon flottant ne quitte plus le Vieux-Port.

Les premières années du XXe siècle sont profitables à la Société nautique de Marseille qui bénéficie d’un engouement en partie dû à la réussite des régates jusqu’à la Première Guerre mondiale. Le conflit va interrompre l’essor des sports nautiques, mais le Pavillon flottant continue d’accueillir les sociétaires laissés à la vie civile et des officiers de passage. Toutefois, les stigmates de la guerre restent vifs et la Société nautique commémore le 2 novembre ses membres morts pour la France. Cette cérémonie annuelle est également l’occasion de rendre hommage aux morts en mer et se termine régulièrement au Pavillon flottant sur le Vieux-Port.

Au-delà de cette cérémonie, le bâtiment accueille également les remises de prix de différentes compétitions sportives ou encore des dîners mondains qui contribuent à faire la renommée du lieu.

Cette notoriété est également due à la beauté du bâtiment qui se déplace en 1936 au quai du Port en face de la mairie. Deux ans plus tard, il s’installe définitivement au quai Rive-Neuve. Avec ce Pavillon, le yachting marseillais, qui ne cesse de se développer, possède alors le lieu espéré pour rayonner sur l’ensemble du bassin Méditerranéen. Or, la Seconde Guerre mondiale marque un coup d’arrêt dans sa croissance. Les activités nautiques sont interrompues et le Pavillon flottant est même réquisitionné par l’Allemagne en 1944.

À la Libération, le Pavillon flottant est récupéré par la SNM. Elle va chercher à restaurer ses activités et à développer la pratique des activités nautiques à Marseille. Plusieurs compétitions sont créées pour favoriser l’essor de la voile. L’une des plus fameuses compétitions est celle du Vire-Vire, une compétition « familiale » ouverte au plus grand nombre. À chaque fois, le Pavillon flottant est un lieu incontournable pour les yachtsmen désirant s’inscrire aux épreuves ou ceux qui se rendent à la remise des prix.

Le Pavillon flottant depuis le drame de 1957

Le 31 janvier 1957, un incendie se déclare dans le Pavillon qui subit de gros dégâts. André Mauric, architecte naval de renom, est notamment chargé d’évaluer le préjudice et supervise les grosses réparations nécessaires. Le style colonial « Nouvelle Orléans » est remplacé par un style plus sobre. Néanmoins, cet évènement ne vient pas perturber la progression de la voile à Marseille. Le nombre de pratiquants croît fortement et touche progressivement toutes les catégories sociales au sein des différents clubs de la ville. La Société nautique reste tout de même la figure de proue du yachting et organise de nouvelles compétitions. La plus importante est créée en 1966 : c’est la Semaine nautique internationale de Marseille (SNIM) qui a lieu tous les ans.

Le Pavillon flottant reste alors essentiel pour la SNM et ses sociétaires, mais aussi pour les personnes qui souhaitent profiter du restaurant. Le bâtiment ne connaît alors que peu de modifications avant les années 1990 où l’intérieur est complètement réaménagé. Une bibliothèque voit notamment le jour à la place de l’ancienne voilerie détruite par les flammes en 1957. Cette bibliothèque offre alors une importante documentation sur l’histoire de la voile et de ses techniques notamment grâce aux dons de sociétaires. En 1999, André Mauric cède sa collection personnelle à la Société nautique ce qui permet à la bibliothèque de s’étoffer sensiblement. Elle est alors renommée bibliothèque André Mauric et devient un lieu de conservation patrimonial de l’histoire du nautisme.

Soucieux de conserver le Pavillon flottant, la Société nautique œuvre pour conserver et promouvoir cette œuvre patrimoniale qui symbolise l’identité du club et qu’elle érige au rang des principales merveilles du patrimoine marseillais au même titre que le Ferry-Boat ou encore Notre-Dame de la Garde. Sans connaître le même engouement, l’intérêt du Pavillon flottant est réel. Il est mentionné dans plusieurs ouvrages touristiques de la ville et est inscrit à l’Inventaire supplémentaire des Monuments historiques en 2007. Le Pavillon flottant est alors un haut-lieu du patrimoine nautique de la ville depuis près de 130 ans et devrait se trouver de nouveau sous le feu des projecteurs à l’occasion des épreuves de voile des Jeux olympiques de Paris 2024 qui se tiendront dans la ville.

Bibliographie

Cyprien-Fabre Alphonse, Aureto e Aurasso (zéphirs et aquilons) : les beaux jours de la navigation de plaisance à Marseille (1846-1914), Éditions du Feu, Aix-en-Provence, 1932.

Dessemond Maurice, Du Yachting à la plaisance, 125 ans au fil de l’eau et du temps, Éditions Pacte Sud, 2013.

Poilroux Hubert, Marseille et sa plaisance, Paris-Marseille, Éditions maritimes d’outre-mer Jeanne Laffitte, 1982.

Lombardi, Rémi