Le stade Victor Marquet

Le stade Victor Marquet

Le stade Victor Marquet est un lieu de sport central à La Seyne-sur-Mer. Situé aux abords du centre-ville et au carrefour entre la gare ferroviaire et les deux principales artères de la ville, son histoire, riche, controversée mais intimement liée à l’Union sportive seynoise en fait un élément du patrimoine local auquel les Seynois sont attachés.

Victor Marquet, un personnage emblématique de La Seyne

Parisien de naissance et ouvrier aux Forges et Chantiers de la Méditerranée depuis 1899, Victor Marquet a toujours côtoyé le monde du sport. Élève au lycée Lakanal de Sceaux en région parisienne, il cofonde avec Franz Reichel le club de sport du lycée, qui participera, avec d’autres, à la création de l’Union des sociétés françaises de sports athlétiques. Avant son service militaire, il s’engage au Stade français et pratique la course à pied, l’escrime et la gymnastique.

En arrivant à La Seyne-sur-Mer, Victor Marquet considère le rugby comme un sport de référence. Autour de la rade de Toulon, la discipline n’est pas populaire, seulement présente à Hyères. Il décide d’en vanter les mérites, ce qui lui permet de recruter des joueurs pour organiser des matches de football-rugby et de créer de nouvelles sociabilités dans le monde ouvrier. En 1901, il fonde l’US Seynoise.

Homme de caractère, réputé dur avec ses hommes, et de conviction, il réussit partout où il passe en saisissant les opportunités qui se présentent à lui. En octobre 1902, il participe à la création de l’Étoile sportive toulonnaise, et en devient le président en 1906. Il décide aussi de la fusion entre « l’USS » et « l’EST » en 1907, de laquelle naîtra le Stade varois, puis le Rugby club toulonnais. À La Seyne, « l’USS » est remplacée par l’Olympique seynois.

Victor Marquet revient une première fois au club en 1921, au moment de la refondation de l’US Seynoise en un club omnisport, quelques mois après la disparition de l’Olympique seynois. La section rugby est revitalisée et retrouve son identité, avec l’adoption des couleurs officielles et définitives, le rouge et le bleu marin, héritées du Stade français et des couleurs historiques de la ville, l’azur et le gueules. Après un nouveau départ, il revient en 1941 pour redresser la situation financière du club, descendu en division Fédérale. Il meurt tragiquement lors des bombardements de la ville en avril 1944.

Une histoire mouvementée entre le club et son stade

En 1948, quatre ans après la mort de son fondateur, l’US Seynoise décide, en accord avec la mairie, de renommer son stade « Victor Marquet. » Son ancien nom, « stade de la Muraillette », qui tient son origine du muret qui longeait le terrain, reste adopté par les partisans de l’USS.

À l’origine, la Muraillette était un terrain marécageux que la mairie ne pouvait pas utiliser. Le terrain de la caserne de la Gatonne était privilégié, mais partagé avec les militaires. En 1904, le stade est loué à Victor Marquet et « l’USS » peut l’utiliser. Quelques travaux sont réalisés pour le rendre praticable et ajouter des locaux en bois pour les vestiaires. Avec la création de l’Étoile sportive toulonnaise, Marquet conserve la location du stade et l’Olympique seynois se délocalise au stade du quartier Saint-Antoine. Puis, au début des années 1920, le club seynois utilise le vélodrome de la Canourgue. En fait, il ne s’installe définitivement à la Muraillette qu’au milieu des années 1920, après l’échec de la construction du stade Barrel.

Le stade est régulièrement jugé vétuste. De premiers grands projets de rénovation sont organisés en 1948, sous l’impulsion de l’adjoint municipal aux sports Paul Pratali et après deux premières tentatives en 1930 pour la construction d’un palais des sports et en 1939 avec le projet Lamarque. Les vestiaires en bois sont détruits, remplacés par de nouvelles structures en dur alors que les tribunes de l’ancien hippodrome de la Gourban sont réutilisées. En 1955, une tribune de 1 000 places est construite côté sud, tandis que les vestiaires et le terrain seront à nouveau rénovés au début des années 1970.

Les vestiaires et la pelouse sont les principaux soucis de la municipalité, du fait de leur dégradation très rapide. Dans l’entre-deux-guerres, le terrain reste marécageux et difficilement praticable, ce qui va influencer le jeu de l’équipe en mettant en pratique l’art du dribbling.

Enfin, de 1994 à 2006, le stade Marquet, jugé trop petit, est délaissé au profit du stade Léry, situé à l’extérieur du centre-ville. Mais cette délocalisation déplaît à de nombreux Seynois attachés au stade. Ainsi, un dernier projet de réhabilitation voit le jour en 2006 pour le rendre à nouveau fonctionnel. Alain Ajello, l’adjoint aux sports à la mairie d’Arthur Paecht, voit à travers ce projet le « renouveau de ce stade mythique » et un retour aux origines rugbystiques de l’USS. Une nouvelle tribune de 1 000 places est érigée, renommée « Aimé Sias », du nom de l’une des plus grandes figures de l’histoire de l’Union, et la maison de la gardienne, symbolique, est reconstruite.

Un lieu de l’identité seynoise inscrit dans le patrimoine local

Le stade Marquet est « une construction emblématique de la ville », selon les mots d’Alain Chapparo, adjoint au maire, publiés dans la brochure La Seyne sportive, et un lieu de sociabilité à chaque événement rugbystique. La ville vibre pour son club, surtout après les « Trois Glorieuses », la période la plus faste du club. Entre 1975 et 1978, le club enchaîne trois montées successives, des divisions régionales à la finale de deuxième division pour l’accession à l’élite du rugby français. Avec une politique de formation de jeunes rugbymen initiée après la Seconde Guerre mondiale, contrastant avec l’élitisme du « RCT », l’US Seynoise et le stade Marquet ont une identité marquée et plus familiale.

Le club sait aussi célébrer ses anciennes gloires, comme Aimé Sias ou Gaël Fickou, aujourd’hui coprésident du club avec son frère, Jérémie. Aussi, l’US Seynoise incarne le patrimoine de la ville. Le pont transbordeur qui apparait sur le logo du club rappelle la longue histoire entretenue entre le rugby et les chantiers navals, tout comme son ancien nom, « USS-FCM ». Le surnom de « La Mecque » est toujours partagé par de nombreux supporters, évoquant le drapeau que l’on brandissait sur la colline du Mai pour signaler qu’un détenu s’échappait du bagne de Toulon. De l’expression « Il y a le mât au Mai », la ville a été surnommée La Mecque, ville natale de Mahomet.

Bibliographie

Autran, Marius, « De l’Olympique Seynois à l’OMS de 1980. Cent ans de sport à La Seyne », Images de la vie seynoise d’antan, T. 3, 1990.

Gaugain, Jean-Claude, Jeux, gymnastique et sports dans le Var (1860-1940), Paris, L’Harmattan, Coll. « Espaces et Temps du Sport », 2000.

Gaugain, Jean-Claude, « Les origines du sport à La Seyne-sur-Mer (1860-1914) », Regards sur l’histoire de La Seyne-sur-Mer, La Seyne, Association pour l’histoire et le patrimoine seynois, n° 2, novembre 2001, p. 7-14.

Giovannetti, Henri et Giraudo, Jean-Marc, Un dimanche à la Muraillette. Un siècle de rugby à La Seyne, La Seyne, Association Les « Boumians », 1996.

Brunelli, Théo